Jenny sans bouillir
Je pensais avoir tout prévu. J’avais même acheté ma place à l’avance en cas d’affluence : c’était quand même leur premier concert parisien, et leur côte n’a cessé de monter depuis leur précédent album (ils viennent de signer sur Warner). Tout prévu sauf que le matin même je me retrouve cloué au lit par un début de gastro. Pourtant je ne pouvais pas rater ça. Pas Rilo Kiley. Ca fait trop longtemps que je les attends. J’ai adoré More Adventurous, l'échappée solo de Jenny Lewis & The Watson Twins, son concert parisien... pas question d'être excusé pour raison médicale. Je me refais une petite santé avec un peu de Spasfon et beaucoup de Coué. Et ça marche. Je suis à nouveau debout, prêt à aller les applaudir. Je trépigne même : depuis le début de la semaine, je révise les albums précédents, et je découvre sur leur myspace des extraits du tout dernier, Under The Blacklight.
Je n’ai décidemment rien prévu : pas non plus que le Nouveau Casino ne soit qu’à moitié plein. Ils peuvent bien faire la couverture de Spin Magazine (qui se demande s’ils ne sont pas les nouveaux Fleetwood Mac) aux États-Unis, la presse française n’a pas encore craqué : Under The Blacklight doit être le premier disque à se retrouver distribué dans nos bacs. Je n’ai aucune difficulté à me glisser parmi les premiers rangs, aux premières loges pour observer leur entrée en scène un peu avant 21h00. Petite poupée rousse, Jenny Lewis a revêtu une combinaison de playmate qui met bien sa poitrine en valeur : je suis suffisamment près pour lire son prénom en lettres brillantes sur la sangle de sa guitare, mais pas assez pour déchiffrer le prénom qu’elle porte à son cou. Elle, je la suis depuis que je l'ai découverte sur l'album de The Postal Service, et je découpe même ses photos dans les journaux (même si ja la trouve beaucoup plus jolie au naturel). Rilo Kiley lance l’offensive sur «It’s a Hit », le morceau qui ouvrait More Adventurous, et je sais déja que je vais passer une bonne soirée. Je bombe le torse pour que Jenny remarque que j’ai mis le t-shirt de sa tournée solo, celle qui passa ici même l’an dernier. Je suis fan, vous l’ai-je dit ?
Mais le vrai numéro de Rilo Kiley, c’est Blake Sennett, le guitariste (qui mène aussi une carrière solo en tant que The Elected). Car il n‘y a pas qu‘au niveau du look (noeud papillon, gilet de costume et raie sur le côté) qu’il est à côté de la plaque : il demande s’il faut parler au public en anglais ou en allemand, ne respecte pas la liste des titres et introduit les chansons au mauvais moment... il est visiblement dépassé par le début de leur tournée européenne. Mais offre un très beau passage acoustique quand une partie du groupe s’absente en interprétant « Ripchord » au ukulélé (accompagné par le bassiste Pierre de Reeder à la mandoline) . Les nouveaux morceaux s’insèrent harmonieusement dans le set, même s’ils m’ont l’air plus rythmés que les précédents (« Dejalo», pas chouette celui-là ), avec un tube à la Blondie au milieu (« Breakin’Up »). Et encore plein d’extraits de « More Adventurous » spécialement pour moi : « I Never » (leur pépite soul), « Portion For Foxes », « Does He Love You ». Et même une reprise qui n’est autre que... « Rise Up With Fists », le single tiré de l’album solo de Jenny.
C’est sur un extrait de The Execution of All Things, « Specular Views », qu’ils quittent la scène. Avant de revenir pour « Give A Little Love », le morceau qui conclut leur nouvel album, et qu’ils interprètent en version groupe (on comprend à demi-mot : comme ils auraient aimé l’enregistrer). Ils saluent le public et tirent leur révérence. J‘ai bu du petit lait toute la soirée. J’aurai même été malade de rater ça. Enfin malade, façon de parler.