Comme un Marzi
En matière de lecture, la Grande Zouzou est imprévisible. Elle se prélasse devant les aventures de Keroro ou des Mew Mew à goûter, mais le soir venu, elle ne veut pas entendre parler de mangas. Impossible de lui faire avaler Dans les nuages de Jordan Crane (certainement l'album le plus original que Dargaud ait édité récemment : il provient de chez Fantagraphics) alors qu'elle l'adorerait. Pas de difficulté par contre à rentrer dans Marzi, alors qu' il s'agit du récit très réaliste de la Pologne du temps de Jaruzelski vu à travers les yeux d'une petite fille et qu'il comprend plein de notions que j'ai moi-même du mal à lui expliquer : le couvre-feu, le rationnement, les visas, Tchernobyl, sans parler de la première communion, de la confession... ni des prénoms polonais sur lesquels je bute toujours (Dzidzia, Justysia, Zosia, Dratewka...).
Mais heureusement les deux volumes contiennent aussi leur lot de thèmes fédérateurs (le cochon d'inde, la vie à la campagne, pourquoi les grands ne font pas attention à moi, je veux me faire percer les oreilles...) à même de capter l'attention des lecteurs les plus exigeants. Marzi, c'est un peu l'anti-Martine : elle est beaucoup moins naïve qu'elle ne le paraît, n'aime pas travailler, vomit en voiture et se moque du pape. Elle cherche ses marques dans un monde qui n'est pas fait pour elle : celui qu'a bien connu la scénariste Marzena Sowa, née en Pologne en 1979, et compagne du dessinateur Sylvian Savoia, dont le trait rappelle parfois Frederik Peeters.
Des deux tomes dont j'ai fait l'achat, aucun ne traite malheureusement d'un sujet qui m'intéresse beaucoup : Marzi fait-elle des histoires avant d'aller se coucher ? Chipote t-elle sur les livres qu'on se propose de lire avec elle ? La réponse figure t-elle au sommaire du numéro 3 qui vient de paraître ?