Elliott Blues
Quand j’ai fait du ménage parmi mes cassettes audio, je n’ai conservé que des enregistrements live que j’ai réalisés avec un matériel amateur et que je n’ai pour ainsi dire jamais réécoutés. Mais parce qu’ils ont été faits sous le manteau, parce qu’on m’y entend respirer dans le micro et parfois réclamer des morceaux entre les rappels, j’y suis attaché. Le premier concert parisien d’Elliott Smith tient une place toute particulière dans mon palmarès. Parce que j’avais eu la chance de parler avec lui un peu après. Parce qu’il avait joué seul la plupart des morceaux de Either : Or, qui demeure mon album préféré, et certains de XO qui étaient encore en gestation (« Waltz #2 », « Oh Well Okay », « Independance Day »…), qu’il avait repris « Thirteen » en rappel et qu’il s’était dégagé de cette soirée un sentiment de proximité que je n’ai jamais retrouvé dans aucun de ses concerts.
Heureusement, d’autres enregistrements de la même tournée ont été réalisés dans des conditions plus professionnelles, sans en altérer l’émotion à fleur de peau. Un mois après son passage à Paris, Elliott se produit en Suède pour le compte d’une émission de radio. La setlist est sensiblement la même. Sa voix hésite un peu sur « Angeles », le morceau d'ouverture, mais il trouve vite ses marques et délivre une très belle prestation. En l’écoutant, j’ai l’impression de me retrouver du coté de la place de Clichy, le 29 mai 1998. A cette époque, la carrière d’Elliott Smith prenait un nouvel essort : il venait de placer deux titres sur la BO de Will Hunting et ses disques sortaient en Europe pour la première fois. C’était avant la signature chez Universal, avec l’exil à Pigalle, avant Figure 8… L'américain à Paris était promis à un bel avenir. Malheureusement, le sort en a décidé autrement.