Une rasade de Vermut
A partir du mois d'octobre, je commence à mettre des livres de côté pour Noël. Aucun d'eux n'est à proprement parler impressionnant, mais c'est leur avalanche, le jour donné, qui fait son petit effet. Je peux mettre jusqu'à six mois à m'en remettre. Même si j'avais immédiatement été attiré par son dessin, Le banyan rouge fait partie de ceux qui se sont retrouvés un peu malgré eux en dessous de la pile et que je n'ai découvert que récemment.
Un petit tour sur le site de Carlos Vermut permet de se rendre compte du panel d'influences de cet espagnol dont c'est le premier album paru en France : la bande dessinée, mais aussi l'animation et un sens de la couleur hérité des meilleurs illustrateurs. Jamais pourtant ce kaléidoscope d'influence n'empiète sur sa personnalité. Il faut voir l'affiche de Kill Bill qu'il a redessinée pour se rendre compte que son style ne ressemble à aucun autre. Ou peut-être à celui d'un des américains qui m'impressionne le plus actuellement : Genndy TartakovskyTartakovsky, le père du Laboratoire de Dexter, de Samourai Jack et de Clone Wars (il est probable que, si vous n'êtes pas abonné à Cartoon Network ou que vous n'ayez pas d'enfants, ces références vous soient étrangères. Ce n'est pas grave, vous pouvez continuer la lecture de cet article).
Le banyan rouge est un conte cruel : pour retrouver l'usage des bras qui lui ont été amputés, Kailash doit obéir au chantage d'un brahman, kidnapper une princesse et la jeter dans les flammes. Son intégrité physique au prix de son asservissement moral. Un dilemme classique, mais un traitement graphique innovant. Et encore plus que le dessin et la mise en page, c'est surtout la couleur qui explose à chaque page : des vermillons, des carmins intenses. En un seul album, Carlos Vermut se hisse à la hauteur d'un Christophe Blain. En possède t-il pour autant la fibre romanesque ? J'attendrais Noël prochain pour le savoir. Ou peut-être plus tard encore : Psico Soda, son second ouvrage, ne semble pas avoir trouvé d'éditeur en France.