A pas de géant

Les 25 ans de la sortie de Soul Mining ne seront pas marqués par une édition définitive du chef d'oeuvre de The The : la version remasterisée ne comporte malheureusement aucune des versions maxi de l'époque ("Uncertain Smile", "This is The Day", "Soul Mining"), ni aucun des 5 titres bonus inclus sur la cassette audio. Si j'en crois le tracklisting, l'album comporte même un titre de moins ! Il faut donc se contenter du disque et rien que du disque : cette réponse venue d'Angleterre aux expériences d'hybridations sonores tentées de l'autre côté de l'Atlantique par les Talking Heads. En mélangeant des percussions africaines au son des boîtes à rythmes (les 9 minutes hypnotiques de "Giant") ou de l'accordéon aux guitares ("This Is The Day"), Matt Johnson n'était pas en retard sur son temps. Sans pour autant renier ses racines : aussi bien le batteur d'Orange Juice que le clavier de Squeeze (un certain Jools Holland, qui a fait du chemin depuis) participent à l'enregistrement.

Evidemment, à l'époque où je l'ai découvert, je n'ai jamais entendu parler ni de l'un ni de l'autre, et encore moins des têtes qui parlent. J'ai juste pris Soul Mining pour ce qu'il n'a jamais cessé d'être : une sacrée claque. J'ai attendu demain toute ma vie, comment peux-tu prétendre me connaître alors que je ne sais même pas qui je suis, je suis juste un symptôme du déclin moral qui gangrène ce pays : mon cahier de textes était couvert de citations de Matt Johnson, issues de Soul Mining et de Infected, son successeur. J'ai vu The The concert toutes les fois où le groupe est passé à Paris, même quand c'était au Zénith et qu'il fallait s'enfiler El Ultimo De La Fila en première partie dans l'espoir de peut-être apercevoir Johnny Marr aux cotés de Matt Johnson (mais ce n'était pas lui). Et puis le feu, celui dont il est question dans "Kingdom of Rain", a fini par s'éteindre. Je ne sais même pas si j'ai écouté Dusk ou son album de reprises de Hank Williams. J'ai soldé l'affaire The The certainement plus vite qu'elle ne le méritait.

En réécoutant Soul Mining, je suis autant stupéfait par l'audace (l'album s'ouvre sur un rap blanc percutant), les mélodies que le graphisme (très marqué par l'école Bazooka). The The m'a ouvert les oreilles à l'adolescence. Chaque fois que j'aperçois ce CD chez des parents quand je viens chercher ma fille après un anniversaire, j'ai envie de les prendre dans mes bras, de le mettre à fond et de faire des percussions avec tout ce qui me tombe sous la main. Evidemment, je ne l'ai jamais fait. Je n'ai pas envie que la grande Zouzou soit sur la liste noire parce son père, dès fois, il est bizarre. N'empêche que. J'ai attendu demain toute ma vie, et ce n'est pas aujourd'hui que ça risque de s'arrêter.

Comments

[M.Pat]

Récemment "Sony connect" m'avais gracieusement offert 10 chansons à télécharger. Un peu pris de court j'ai miraculeusement pensé à The The (mais pourquoi ? ) et me suis donc offert "this is the day". Pour les 9 autres je préfère rester discret de peur d'être définitivement tricard sur ce blog...