La possibilité d'une île
L'année du sacre d'Arcade Fire, Technikart choisissait de se démarquer en élisant album de l'année Return To The Sea de Islands. Pour être honnête, j'étais totalement passé à côté et, sans cet appel du pied, je ne l'aurais certainement jamais écouté. Il y avait certainement une part de snobisme à mettre en avant un disque aussi mésestimé, mais aussi une curiosité supérieure à la moyenne : à la séance de rattrapage, Return To The Sea, sous des dehors peu seyants (pochette bâclée, morceau d'ouverture interminable...), s'avérait être un petit chef d'oeuvre d'excentricité qui préparait le terrain à Hissing Fauna, Are You The Destroyer de Of Montreal. Avec au milieu un tube à la "When You Were Mine" : "Rough Gem". Je ne sais pas si je l'aurai élu album de l'année : mais impasse de l'année, en tout cas, haut la main.
C'est aussi dans Technikart que j'ai eu vent de la parution du second album d'Islands, Arm's Way, présenté comme "plus glam". Plus glam ? La pochette est en tout cas toujours aussi affreuse, mais ce n'est pas très grave, puisque de toute façon Islands est un groupe monstrueux, véritable kaleidoscope pop derrière lequel ni MGMT ni The Ruby Suns ne parviennent à s'aligner. Ils s'attaquent à tout, même au français, même à la biguine. Ils écrivent aussi bien des vrais tubes ("Creeper") que des morceaux d'opéras rock et parviennent à imprimer une patte qui n'appartient qu'à eux : un certain sens de l'épique. Arm's Way est long et éprouvant : il faut plusieurs fois passer le cap de 7 minutes pour arriver à la pièce maîtresse du disque, qui, elle, fait... plus de 11 minutes.
Je ne sais pas du tout si Arm's Way figurera parmi mes disques de l'année 2008 : pour l'instant, je tourne encore autour, partagé entre la fascination et la fatigue (près de 70 minutes d'un coup, sans répit, avec peut-être quelques morceaux redondants vers la fin). J'ai sans doute perdu ma capacité à rester attentif au-delà de 40 minutes, mais pas celle de me passionner pour des causes desespérées. Celle de Islands me rappelle celle des Gorkys Zygotic Minci, groupe pour lequel l'Histoire s'était arrêtée le jour où Kevin Ayers a quitté Soft Machine. Il n'y a pas grand chose à attendre d'eux, si ce n'est des grands disques malades. Et dans le genre, celui-ci remplit son contrat. En double exemplaire, paraphé en bas de chaque page. A l'encre invisible.